Pour définir en quelques mots de la vie de Mère Trinidad,  je pourrais commencer en disant qu’il s’agit d’une vie de très grands contrastes,  à la fois terribles, joyeux et consolateurs. Elle est toute en grandeur et simplicité, humaine faiblesse et irrésistible pouvoir divin ; toute en expériences profondes et elle a la modestie naturelle d’une jeune fille du peuple ou d’une femme d’intérieur qui parle avec la vivacité, la spontanéité et la truculence de la langue populaire andalouse, torrents de sagesse concernant les plus profonds mystères de la foi catholique. Ces contrastes sont la vivante expression des misères et des contingences humaines, mais aussi de l’aspiration de notre cœur à se découvrir des ho rizons sans limites. C’est pour cela, qu’en les écoutant nous sommes subjugués par leur irrésistible force de vérité.

Mère Trinidad est comme l’écho palpitant de ces paroles de Jésus :

« Je te loue, ô Père, Seigneur du ciel et de la terre, parce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et que tu les as révélées aux petits enfants. » C’est comme si le Seigneur à travers elle, voulait dire aujourd’hui au prêtre, aux âmes consacrées, au paysan dans son champ,    à la femme de ménage, au jeune qui débute dans la vie ou à l’homme perdu au milieu de l’agitation des grandes villes : « Regarde, tout mon amour infini est pour toi. Je suis mort sur une croix pour te faire Dieu    par participation ; et en mon Église, j’ai laissé d’insondables trésors pour te combler du bonheur que tu recherches et que tu ne trouves pas. Je    mets en tes mains la profondeur, l’étendue de tout le mystère de ma vie. »

Lire la suite...

Mère Trinidad est née le 10 février 1929 à Dos Hermanas, près de Séville. À six ans a lieu un incident qui aura des répercussions sur un aspect important de son enfance : par jeu, ses petites camarades lui maquillent les yeux avec de la chaux encore vive ; innocente espièglerie enfantine qui faillit la rendre aveugle. Depuis ce jour-là ses camarades de collège la verront tous les jours avec des lunettes noires, et s’asseyant en classe quasiment comme simple auditrice. Et ce fut là pratiquement la seule institution humaine d’enseignement que Mère Trinidad  fréquenta   de toute sa vie.

À quatorze ans elle travaillait déjà avec son père et son frère Antonio dans le magasin de chaussures familial. L’après-midi elle prenait des cours de broderie avec des jeunes filles de son âge. Jusqu’à l’âge de vingt six ans, puis elle quitta sa ville pour Madrid.

Aujourd’hui, quand les prêtres, les professeurs de Théologie, les docteurs et licenciés des Universités Pontificales entendent les conférences de Mère Trinidad sur la vie intime de Dieu, sur le mystère du Christ, sur Marie, ou sur la richesse resplendissante de l’Église, ils font part de leur étonnement et disent n’avoir jamais rien entendu de semblable, et généralement la première question qu’ils posent est : « Dans quelle université Mère Trinidad a-t-elle étudié la Théologie ? »

Quand on leur raconte ce que je vous ai rapporté plus haut, beaucoup ont du mal à le croire, parce que cela les mettrait tout d’un coup face à un prodigieux miracle vivant, permanent et contemporain. Il n’y a alors pas d’autre choix que de faire appel au témoignage des professeurs et élèves de l’école de « la Sagrada Familia », et à tous les habitants de Dos Hermanas qui l’ont vue pendant plus de douze ans comme vendeuse dans son magasin de chaussures « La Favorita ».

Et peu à peu, les théologiens circonspects, renoncent à leur incrédulité injustifiée, car il faut dire que jamais ils n’ont entendu un professeur de Théologie parler avec autant de profondeur, de nuances, de simplicité et de vie que Mère Trinidad sur les vérités de la foi catholique.

Ils se trouvent face à quelque chose d’étonnant, d’incroyable, mais qu’ils voient de leurs propres yeux, et qui se dresse avec une force envoûtante comme un appel de Dieu à tous les membres de l’Église, riches et pauvres, savants et ignorants, prêtres et laïcs, pour qu’ils prennent bien conscience de ce qu’ils sont en étant Église.

On va d’étonnement en étonnement quand on connaît mieux la vie de cette femme simple qui est la Fondatrice de L’Œuvre de l’Église.

Parce qu’en 1979 déjà, elle avait publié son premier livre intitulé

« Fruits de la Prière. Fragments d’un Journal Intime ». Un ouvrage de   541 pages contenant 2217 pensées belles et profondes avec un éventail   de thèmes si large et si évocateur, qu’il est à la fois un traité de Théologie, un appel au cœur angoissé de l’homme d’aujourd’hui, et un chant sublime dédié aux plus belles réalités que l’esprit puisse vivre.

Puis ce fut : « Expériences de l’âme », un recueil de poèmes, et des poèmes religieux ! 310 poèmes qui par leur beauté cristalline nous font franchir le seuil de grands mystères, et au cœur de ces mystères ils nous chantent d’ineffables merveilles et nous racontent les expériences les plus épanouies et sublimes de l’âme au contact de l’Éternel.

La publication suivante fut : « L’Église et son mystère ». Ce livre traite de thèmes enracinés dans la substance même du mystère de l’Église. Comme les précédents, il a été écrit dans un style d’une grande profondeur, de richesse et de beauté. Il revêt en outre un style littéraire original. Sa prose alerte nous offre un large exposé, varié et fluide des réalités vibrantes de vie, que nous voyons en leur perpétuelle éclosion à la source fraîche de l’Église.

Trois livres uniques, inimitables, qui peuvent déverser dans l’âme du lecteur un torrent de sagesse et de vie divines, et lui ouvrir des horizons insoupçonnés.

En novembre 1999, à l’aube de l’an 2000 au seuil du Grand Jubilée, d’une façon… que je ne saurais comment qualifier : imprévue, pleine de zèle enflammé d’amour pour l’Église, sans autre prétention que de présenter son véritable visage aux hommes et à de nombreux membres de l’Église déconcertés, Mère Trinidad a publié un texte qu’elle avait écrit en 1959 sous la forme d’un petit opuscule : « Le véritable visage de l’Église empli et comblé de Divinité ».

La première édition fut épuisée en très peu de temps, on réédita à 10.000, 25.000 exemplaires… et Mère Trinidad commença à recevoir de nombreuses lettres et manifestations d’admiration pour son opuscule et d’immense satisfaction et de gratitude pour l’amour qu’elle porte à l’Église, ce qui l’a encouragée à faire connaître d’autres textes.

Des voix de prêtres, d’Évêques et de Cardinaux se joignent au chœur des fidèles qui expriment leur joie en voyant que l’Église est présentée dans sa beauté « comme une précieuse amphore remplie et comblée de Divinité ».

Pour en témoigner, voici le mot de remerciement d’un prêtre à une paroissienne qui lui avait offert ce petit livre :

« J’ai commencé la lecture en pensant qu’il s’agissait de l’un de ces nombreux feuillets de religiosité populaire si répandus dans le passé, mais dès le début, où il est écrit : “Mon Église, que tu es belle… ! Tu es toute belle, Fille de Jérusalem. ‘Tes yeux sont des colombes’, parce que ton regard est dans le regard même du Père…, Ô mon Église !, toute belle, parée de Divinité même qui te pénètre, te comble, t’ennoblit, t’exalte avec une telle fécondité, que toi, mon Église, tu es le Verbe Incarné même issu du sein du Père se manifestant en Parole et s’embrasant dans l’Esprit Saint. Voilà ton véritable Visage, mon Église… !”, instinctivement je me suis agenouillé pour en finir la lecture. C’est je l’avoue, ce que de toute ma vie j’ai lu de plus beau, de plus profond et de plus admirable sur l’Église, Église grandement méconnue, et pour cela si peu aimée ! »

Un autre opuscule fut publié : « La Promesse de la Nouvelle Alliance », un très riche exposé, dense, profond et évocateur du Dessein de Dieu envers l’homme, réalisé par le Christ, à travers Marie et abrité dans le sein de la Sainte Mère l’Église.

C’est ainsi que naquit la collection : « Lumière dans la nuit. Le mystère de la foi ». Donné en sagesse amoureuse, composée de titres qui dans leur ensemble sont un appel, un signe pour celui qui veut pénétrer, avec une amoureuse sagesse, dans le dogme très riche de notre foi chrétienne.

Aucun d’entre nous qui participons à cette initiative de Mère Trinidad ne pouvait imaginer au début l’ampleur et la profondeur qu’elle atteint aujourd’hui grâce aux fruits de son amour pour l’Église, même si nous savions que cette nouvelle activité, comme toutes celles qu’elle entreprend, était inspirée par Dieu même, seul les faits démontrent que c’est le moment choisi par Dieu – comme elle le dit elle-même ? – pour commencer à exprimer du sein de l’Église un peu du don que, tant que Mère Trinidad est en vie, on peut faire connaître pour le bénéfice de tous ceux qui souhaitent recevoir ce cadeau inestimable de connaissance pleine de sagesse amoureuse du mystère transcendant de Dieu dans son intercommunication intime et familière de vie trinitaire.

La grandeur insondable du Christ, le Fils Unique de Dieu, Lumière de Lumière et Figure de la substance du Père, un avec le Père et l’Esprit Saint, et qui fait Homme par Amour, nous est donné en explication faite de Cantiques éternels par la voie du mystère de l’Incarnation réalisé dans les entrailles très pures de la Vierge qui, étant si Vierge, par L’Œuvre de l’Esprit Saint s’est manifesté en maternité et maternité Divine :

La Famille Divine se manifestant et se donnant à nous, par le Christ, avec un Cœur de Père, Chant de Verbe et d’Amour de l’Esprit Saint au sein de la Sainte Mère l’Église, emplie et comblée de Divinité, et qu’il faut présenter dans toute sa beauté, avec son dogme si riche manifesté     en sagesse amoureuse, pour qu’en la regardant, les hommes voient en   elle le visage de Dieu.

Cependant, les textes les plus profonds et les plus intimes, et sans doute les meilleurs, ne pourront voir le jour du vivant de leur auteur.

Ceux qui connaissent bien l’ampleur et la portée de la production littéraire de Mère Trinidad, sont convaincus qu’elle fait partie des plus grands écrivains de la littérature universelle.

Et comme il est beau ce contraste, et attrayant aussi ! Elle-même confie qu’elle n’a jamais prétendu écrire un livre, mais qu’elle a voulu simplement exprimer à sa façon les expériences de son âme. Elle serait horrifiée en imaginant que l’on puisse parler d’elle d’un point de vue littéraire, parce qu’elle ne s’est jamais considérée un écrivain. Elle se sent

– ce sont ses mots – « l’Écho de l’Église, qui reflète, en sa modeste expression et sa dérisoire répétition, ce qu’est l’Église, ce qu’elle possède, ce qu’elle vit, ce qu’elle souffre et ce qu’elle donne » …, « le cri étouffé du cœur de l’Église qui, palpitant d’amour et de douleur, éclate en chantant, par elle, aux hommes ».

À l’âge de 17 ans a eu lieu dans sa vie un changement capital qui explique cet incroyable paradoxe qui est celui d’avoir atteint un très haut sommet dans le monde des lettres sans le vouloir, sans y penser, et sans avoir lu une seule æuvre d’auteurs plus ou moins importants.

C’était au matin du 7 décembre 1946. Les cloches sonnaient pour annoncer la fête de l’Immaculée Conception aux habitants de Dos Hermanas. En un clin d’œil, alors qu’elle travaillait au magasin comme tous les jours, quelque chose d’unique, de surprenant, de merveilleux et d’impétueux pénétra au fond de l’âme de cette jeune fille ouverte, gaie    et sympathique. C’était Dieu en sa terrible majesté et infinie tendresse   qui passait en frappant à sa porte… !

J’ai entendu plus d’une fois Mère Trinidad évoquer le souvenir du changement qui s’est opéré dans sa vie grâce à ce signe puissant et silencieux : « Je n’ai de ma vie d’avant – dit-elle – qu’un souvenir morose. J’avais alors tout ce qu’une jeune fille de mon âge pouvait désirer. Pendant la semaine j’attendais avec impatience le dimanche après-midi, et les années passaient dans l’attente des fêtes de Saint Jaques Apôtre et “le pèlerinage de Notre Dame de Valme”. Après tous les préparatifs, après avoir tant rêvé de la fête, après l’effervescence, tout était si vite terminé que je me retrouvais l’âme vide, le corps épuisé et dans l’obligation de retrouver le même quotidien… »

« Ce jour du 7 décembre fut comme l’apparition soudaine d’un printemps vigoureux qui emplit ma vie de lumière et mit de nouvelles couleurs à tout ce qui m’entourait. L’Amour Infini était face à moi et semblait me dire : “As-tu besoin d’aimer et d’être aimée ? Je suis l’Amour Infini ! Toncœur est-il avide de félicité ? Je suis la Félicité, la Beauté, la Puissance, la Perfection éternelle… !” Et, depuis ce jour là, mon âme vit dans la plénitude de tous ses désirs, et ses aspirations à être et à posséder sont infiniment comblées ».

LE TABERNACLE DE MON VILLAGE
Lorsque j’évoque le souvenir de ce passé
que j’ai vécu dans le silence de l’oubli,
mon cœur s’enflamme avec ardeur
répondant à ma façon à Dieu bienheureux.

Longues heures en l’église de mon village
penchée sur la poitrine de mon Christ
écoutant doucement de sa bouche
sa plainte en une lamentation retenue…

La paroisse de mon village… !
Combien de mystères j’ai vécus
inconnus de tous,
connus de Dieu seul… !

Près de ma Vierge de Valme
sous sa protection, j’ai appris
la connaissance sapientielle du Dieu du Ciel
et ses mystères divins
que mon esprit a compris,
à travers ce Tabernacle.

Longues heures d’idylles
où mon âme est venue
peu à peu retrouver la saveur,
en des moments que je n’oublie pas,
les mystères que je gardais
en mon cœur blessé,
jour après jour en silence,
parce que l’Amour Infini
était peu connu…

Mon Tabernacle… ! Ma paroisse… !
Le village où je suis née… !
près de ma Vierge de Valme,
pour être, par la volonté divine,
l’Écho de notre Mère l’Église,
messagère d’un dessein
par lequel Dieu a marqué mon âme
quand en son sein Il me dit :
Va proclamer aux hommes
ce que tu as appris de moi.

Le Tabernacle de mon village,
où en priant j’ai compris,
près de ma Vierge de Valme,
tant de secrets divins… !

(Núm. 298)

Le génie du peuple andalou a donné par ailleurs à Mère Trinidad toute sa vivacité, sa force expressive, sa profondeur et son caractère, pour dire et chanter les richesses de la Source Éternelle qui est au cœur de l’Église. Ainsi est apparue sa poésie et sa très grande production littéraire, louée par tous ceux qui la découvrent à travers ses écrits et à présent à travers ses opuscules qui sont comme une pluie d’étoiles dans la nuit qui enveloppe le monde.

ANDALOUSIE BIEN-AIMÉE… !
Andalousie bien-aimée, terre où je suis née… !

Combien de jours, sous ton brillant soleil,
où j’ai donné mon amour à l’Amour Infini… !

Combien de jours, de nostalgie qui attend
et de regrets pour un amour silencieux,
dans tes nuits sereines et étoilées,
où je me suis plongée dans la prière
devinant la douceur infinie du Dieu vivant
par la conversation bienheureuse de son festin éternel… !

Andalousie bien-aimée… ! Terre où je suis née… !

(Núm. 15)

Autre particularité surprenante de la vie de Mère Trinidad, c’est que, en tant que femme, elle ait fondée une Œuvre où se retrouvent des Évêques, des prêtres, des hommes et des femmes qui se consacrent à Dieu, des couples, des jeunes garçons et filles, des personnes âgées et des enfants.

En 1955 elle part pour la capitale espagnole, sans autre but que d’aider son frère aîné qui vient de s’y installer. Pendant toutes ces années elle avait beaucoup vécu et appris au pied du Tabernacle ; elle avait éprouvé les longues attentes, les solitudes cruelles de Jésus dans l’Eucharistie, et son amour ardent ; et toute sa vie, jusqu’alors, avait été un amour, un effort, une idylle pour consoler et faire sourire le Seigneur.  Mais tout cela  se passait dans l’intimité silencieuse et recueillie de la petite et jolie chapelle de Notre Dame de Valme à l’intérieur de l’église paroissiale Sainte Marie Madeleine, là où Jésus fut son seul Maître. Lors de ses longs moments de prière penchée sur sa Poitrine, elle a perçu les secrets les plus intimes du cœur du Verbe de la Vie Incarné, et son âme s’est enivrée – ce sont les mots de Mère Trinidad – de la sagesse amoureuse des Sources Infinies, qui jaillissent du sein du Père, par le côté transpercé de Jésus et grâce à la Maternité de Marie dans le large sein de la Sainte Mère l’Église empli et comblé de Divinité, et se répandent sur l’humanité.

DIEU RESPIRE EN MON INTÉRIEUR
Quand, l’âme emplie d’adoration,
et dans un silence tranquille
je me glisse dans l’intimité

d’un Tabernacle ouvert,
j’écoute la plainte
de Jésus en deuil,
j’écoute le bruit ténu
du frémissement de sa présence
et je sens son souffle…

Et en entrant au fond
de sa pensée,
ce qui m’émeut le plus
c’est d’entendre,
au-delà de mon silence,
cette respiration
en un lent battement,
ce frémissement
de sa tendre poitrine…

Et mon âme se rapproche
pour capturer
cette palpitation
de ses sentiments ;
et j’entends le tic… tac…
qu’en son cœur
l’amour a ouvert.

Et pendant que respire
le souffle éternel,
je respire en lui
tant que je peux pour faire
écho à ses sentiments
par ma respiration.

Quand Dieu respire
en mon sein
je lui réponds par mon
don tant que je peux.

(Núm. 122)

À Madrid, à partir du 18 mars 1959, Dieu brise avec force les cloisons de cette vie cachée. Et Il l’introduit dans le secret de sa vie intime, de cette manière surprenante qui Lui est propre ; Il lui montre ses mystères, les lui fait vivre et y participer, et lui donne pour mission de les proclamer avec cette injonction : « Va  et dis-le ! Ceci est pour tous ! »  Des torrents de lumière, des cataractes de sagesse de profonde expérience, des forces irrépressibles pour dire et chanter les prouesses du Seigneur aux portes de la Fille de Sion…

Un feu qui embrase les entrailles de l’âme, une force irrésistible contre laquelle elle ne peut lutter, pousse Mère Trinidad à dire que : Qu’« Il est urgent de présenter le véritable visage de l’Église, méconnue de la plupart de ses enfants » ; qu’« il faut raviver et ranimer le dogme » ; qu’« il est nécessaire de s’emparer de Théologie et de la donner avec amour à tous les enfants de Dieu » ; que « le sein du Père est ouvert attendant d’être rempli, pouvant accueillir tous ses enfants » ; qu’« il faut faire une révolution chrétienne au sein de l’Église… »

Elle fit entendre sa voix, elle cria presque. Elle frappa de porte en porte chez ceux qui pouvaient l’aider. Elle mena un incroyable combat, jusqu’aux limites de l’impossible. Mais sa voix était humainement trop faible pour être entendue ; de plus elle proclamait une révolution ecclésiale si profonde que la plupart des gens de l’époque refusaient, soit par crainte soit par incompréhension, de l’envisager.

À ce moment-là le Pape Jean XXIII réunissait le Concile. Et… terrible contraste !, lorsque tout le monde parlait de ce qu’il y avait lieu de faire pour l’Église, Mère Trinidad, l’âme débordant de paroles pour l’Église, a dû demeurer dans le silence de l’incompréhension.

Le Seigneur gravait au fer rouge en son âme : « Ce que je t’ai donné, va et remets-le à Jean XXIII » « Le Concile vient pour cela… ! »

Et cette jeune femme de trente ans à peine, perdue dans la solitude d’une grande ville, désemparée, sans recours ni aide d’aucune sorte, entreprend la grande aventure qui la mènera jusqu’à Rome à la rencontre du Successeur de Saint Pierre pour parler avec lui.

Elle arrive à Rome et Dieu la conduit jusqu’au au Successeur du Prince des Apôtres. Mais – ce sont ses mots – « les très grands » l’empêchent de parler au Pape et devant Jean XXIII elle doit se taire.

Franchissant des obstacles qui semblaient insurmontables elle retourne à Rome trois ans plus tard. Mais désormais c’était « trop tard », comme le Seigneur le lui avait fait comprendre par avance : Jean XXIII entrait en Retraite spirituelle, et la première session du Concile allait débuter. Ceux qui plus tard liront son journal personnel et sauront tout comprendront les raisons de ce qui aujourd’hui encore reste recouvert    par le silence de l’incompréhension.

Cependant, le Seigneur intensifiait ses messages, ses encouragements et ses requêtes. Et du fracas de ces éclairs Il fit jaillir dans l’âme de Mère Trinidad « L’Œuvre de l’Église » : un groupe porteur de la vigueur de l’Église, une légion où se retrouvent tous ceux, sans distinction de sexe, de profession ou de condition sociale, qui en vivant profondément leur foi chrétienne et, étant aux côtés du Pape et des Évêques, montrent au monde, par leur vie et leur parole, le véritable visage de l’Église ; avec pour mission d’aider les hommes à connaître la sagesse et la vie ecclésiale dont elle-même était comblée.

Elle était pratiquement seule pour réaliser tout cela, avec les pauvres moyens d’une jeune femme quittant son village du sud pour la capitale de l’Espagne. Si l’on pouvait raconter les difficultés, les souffrances et les incompréhensions auxquelles Madre Trinidad a dû faire front jusqu’au moment où elle a réussi à fonder l’Œuvre de L’Église, on se rendrait vraiment compte de sa personnalité et de sa force de caractère. Elle a du briser de nombreuses barrières, se heurter aux portes fermées et livrer de durs combats. Parfois, face à la force de Dieu qui la poussait, face à la grandeur de ce qu’elle devait entreprendre et aux obstacles, qui comme de gigantesques montagnes se dressaient devant elle, elle éprouvait en son âme la nostalgie de ce recoin de la chapelle du Tabernacle de son village où elle fut si heureuse avec le Jésus de sa jeunesse. Et, essuyant ses larmes, elle se tournait vers le Seigneur pour lui demander :

« Pourquoi moi… ? Pourquoi ce doit être moi, Seigneur… ? »

Pour toute réponse, elle reçut une douce et tendre expérience intérieure : « Parce que Je n’ai pas trouvé de créature plus pauvre et plus démunie que toi sur terre ». Et jour après jour, année après année, Mère Trinidad a peu à peu forgé son Œuvre de l’Église, faite de différentes Branches et Groupes, donnant à chacun d’eux une physionomie propre à l’intérieur d’une unique réalité qui les englobe tous. Une tâche profonde, ample et variée qui à elle seule nous montre la riche et exceptionnelle personnalité de cette femme capable de former théologiquement et spirituellement ses prêtres, ou de faire que ses laïcs soient de vivants témoins de l’Église dans le monde. Capable aussi de conseiller les couples en difficulté ou d’orienter un jeune homme à la consécration à Dieu, et capable aussi de diriger la vie de ses communautés ou d’organiser un camp de jeunesse.

Depuis 1963 Mère Trinidad a ouvert dans le cadre de son Œuvre plus de 40 maisons en Espagne et à l’étranger. Elle s’est personnellement occupée de chacune d’elles. Parfois, alors qu’elle dessinait des plans ou devait se battre avec les maçons, les menuisiers ou les chauffagistes, ou qu’elle rentrait épuisée pour avoir arpenté les magasins de la capitale, on pouvait l’entendre protester gentiment et avec sa grâce sévillane :

« Seigneur, quand tu m’as demandé de te faire L’Œuvre de l’Église, jamais je n’aurais imaginé devoir faire ces choses ».

Il y a encore peu de temps, elle s’occupait personnellement de toute la gestion économique de L’Œuvre. Une fois qu’elle a imprimé son style, y compris dans la façon de conduire les affaires matérielles, aux hommes et femmes qui viennent l’aider, elle n’intervient plus dans la gestion que dans les moments décisifs ou dans les cas ou un réajustement est nécessaire.

Elle a implanté son Œuvre de l’Église dans 7 diocèses espagnols. Ensuite à Rome, où se sont ouvertes 5 maisons de l’apostolat. On lui a également confié la paroisse de « Notre Dame de Valme ». De Rome, L’Œuvre va se développer dans d’autres diocèses d’Italie, et étendre son rayonnement apostolique à d’autre pays, principalement aux pays hispanophones d’Amérique du Sud.

Mère Trinidad maintient cet ensemble complexe de personnes, d’activités et de biens totalement ouvert et prêt à propager l’authentique rénovation ecclésiale qu’elle-même porte gravée en son âme depuis 1959. C’est dans ce but qu’avant tout, elle a voulu faire de L’Œuvre la vivante incarnation de cette rénovation. Et d’une manière pacifique, silencieuse et le plus souvent sans que l’on s’en rende compte, elle a déjà réalisé, mis en pratique et expérimenté plusieurs des objectifs indiqués par le Concile Vatican II, y compris ceux que tout le monde regarde avec espoir et regret, et ceux que beaucoup considèrent comme des utopies en voyant la confusion et même le désastre causé à l’Église par le fait d’avoir essayé d’atteindre ces objectifs par des voies si peu évangéliques.

Une simple énumération de certaines actions incontestables, exposées aux yeux de tous, suffisent à étayer cette affirmation qui pourrait paraître exagérée :

—Application de la Théologie dans toute sa profondeur et sa richesse, en la mettant à la portée de tous, y compris des plus humbles et des plus dépourvus culturellement.

—Formation et perfectionnement des laïcs afin qu’ils remplissent leur rôle de membres actifs et dynamiques du Corps Mystique ; en leur permettant d’une part de vivre pleinement leur réalité de chrétiens selon leur plus profond désir, et d’autre part d’assumer leur responsabilités apostoliques dans les domaines les plus divers selon leurs capacités et désirs personnels.

—Rénovation de la vie du prêtre, solution des problèmes liés à son identité sacerdotale dans un milieu laïque conscient de son rôle dans l’Église et qui demande au prêtre qu’on lui attribue des tâches qui lui   sont propres ; formation permanente, vie familiale, etc…

—Façon naturelle, attrayante et simplement évangélique de vivre son dévouement ceux dont la vie est consacrée à Dieu, dans un monde qu’ils doivent gagner à la cause du Christ.

—Éveil des vocations, pour la prêtrise aussi bien que pour la vie consacrée.

—Accompagnement réussi lors de leur formation, des candidats à    la prêtrise, encourageant et en renforçant leur idéal d’être ministres du Christ chargés de répandre les mystères divins parmi les hommes, sans   les couper du monde où ils vivent, en leur permettant de garder le contact avec les réalités apostoliques qu’ils doivent développer et dans l’environnement même de ces réalités.

—Dynamisation des paroisses comme reflet et concrétisation du Grand Foyer de l’Église ; en tirant parti de la force apostolique des moyens et des méthodes à l’efficacité éprouvée au cours des années ou des siècles, et en en cherchant de nouveaux et nécessaires aujourd’hui pour atteindre l’ensemble des paroissiens et résoudre leurs problèmes spirituels et matériels.

—Présentation du mystère de l’Église, dans sa surabondante richesse et dans sa dynamique rénovatrice, à des milliers de prêtres, religieux et religieuses, et laïcs de toute origine sociale, lors des divers jours de retraite spirituelle appelés « Le Plan de Dieu en l’Église », « Jours de retraite sur le mystère de Dieu en l’Église », « Jours d’orientation de la jeunesse », conférences, etc.

Inutile de poursuivre cette énumération… Toutes ces actions sont interdépendantes, et ne peuvent se réaliser les unes sans les autres. Mère Trinidad en avait tellement conscience qu’elle disait déjà en 1959 qu’il fallait « faire une révolution chrétienne au sein de l’Église » pour lui restituer la splendeur et la plénitude de vie que le Christ lui a données lorsqu’Il l’a fondée.

Malgré ce long exposé, je n’ai fait qu’évoquer certaines réalités visibles. Bien sûr, elles reflètent et elles proviennent de profondes expériences intérieures, mais la raison la plus profonde, la puissante réalité qui a forgé la personnalité spirituelle et humaine de Mère Trinidad, sa mission dans l’Église, sa dimension transcendante et la manière prodigieuse presque insoupçonnable dont Dieu a façonné l’âme de cette femme si simple en vue de la réalisation d’un dessein éternel et amoureux dans son Église, tout cela doit nécessairement nous demeurer caché jusqu’à ce que – dit-elle – elle parte pour la Maison du Père.

Nous avons assisté récemment à l’une des manifestations les plus révélatrices à cet égard, alors que Mère Trinidad s’adressait à un groupe de prêtres. Son amour pour l’Église et la douleur de son âme en la voyant si humiliée, se sont révélés après qu’elle eût entendu, encore une fois, qu’en tout lieu apparaissent des « docteurs » de mensonge qui sèment le trouble parmi le Peuple de Dieu. Et de son cœur vint comme une quête, comme une plainte : « Les réalités dont je vous ai parlé, je ne les ai pas apprises dans les livres, ce ne sont pas les hommes qui me les ont enseignées. Je suis un simple témoin. Et la véracité de mon témoignage est indéniable parce qu’elle est en accord avec les enseignements de l’Église. » Et une autre fois :

« Dieu me fit son témoin pour que je sois son prophète », prophète qui doit parler au nom de Dieu à son Peuple.

Un témoin qui doit apporter son témoignage. « Écho » dont la mission est de répéter fidèlement la parole prononcée ; modestie de celui    qui n’a rien à dire pour lui-même, et richesse abondante de la voix par laquelle s’exprime la vie glorieuse et la douleur sanglante de l’Église : Ceci est la synthèse de la vie et de L’Œuvre de Mère Trinidad.

Extrait du livre publié MÈRE TRINIDAD DE LA SANTA MADRE IGLESIA ET SON ŒUVRE DE L’ÉGLISE

Note .-  Pour télécharger le livret complet sur les appareils électroniques, cliquez ici.